Emmanuel Moire: « Je rejoins Demain nous appartient »
Retranscription de l’Interview accordée par Emmanuel Moire à Télé 7 jours (Amandine Scherer) publiée le 12 juillet 2021 (programmes du 17 au 23 Juillet 2021)
T7J: Grande nouvelle: vous voilà comédien!
EM: C’est peut-être surprenant pour certains, mais, pour moi, c’est une évidence. Après avoir travaillé de manière intense la comédie pour le spectacle Cabaret, j’en suis sorti en me disant que j’avais trop longtemps ignoré l’acteur en moi. Même si je me considère comme un interprète depuis toujours, je n’ai jamais chanté sans être connecté à quelque chose. Idem avec Fauve et Danse avec les stars: on se demandait toujours ce que l’on avait envie de raconter avec nos mouvements. La seule chose qui m’a toujours empêché de me sentir acteur, c’est que je n’ai pas un parcours classique: je ne suis pas allé dans une école ou au Conservatoire. Dès que je me retrouvais face à de vrais acteurs, je perdais mes moyens.
T7J: Vous ne vous sentiez pas légitime, peut-être?
EM: C’est l’histoire de ma vie. La confiance, c’est quelque chose de défaillant chez moi. Je gère cela tant bien que mal. Ce qui me sauve, à chaque fois, c’est le travail. Alors, juste avant ma dernière tournée pour l’album Odyssée, j’ai suivi une formation d’acteur. C’était le seul moyen, pour moi, d’avoir confiance. J’ai passé cette année silencieuse à travailler mes outils de comédien. Et, une semaine après la fin de ma formation, TF1 m’a appelé pour passer le casting de Demain nous appartient.
T7J: Les planètes étaient alignées!
EM: Oui, j’y ai vu un signe. Pour moi, c’est une chance incroyable. Quand tu sors de formation, c’est difficile de trouver tout de suite du travail en tant que comédien. Je voulais rester dans une certaine dynamique. Je suis arrivé au casting, mon premier en tant qu’acteur, et tout s’est bien passé. J’avais beaucoup travaillé le rôle, j’étais capable de m’adapter aux demandes de la directrice de casting… Quelques jours plus tard, elle m’a appelé pour me dire que les gens de TF1 avait beaucoup aimé mes essais, mais que je ne correspondais pas au rôle.
T7J: Vous étiez déçu?
EM: Pas vraiment. Il y avait du positif dans cette expérience. Et puis, c’était un rôle de père de famille. C’est tout à mon honneur de ne pas avoir le physique de l’emploi! (rires) Mais la bonne nouvelle , c’est qu’une semaine après, TF1 me rappelait pour me dire qu’ils allaient écrire un rôle pour moi. Je n’aurais jamais imaginé commencer ma carrière d’acteur dans une série aussi populaire! En annonçant la nouvelle à ma famille, j’ai découvert que ma mère la regardait. C’est une école incroyable pour débuter.
T7J: Les feuilletons comme Demain nous appartient sont aussi de très grosses machines, en termes de tournage…
EM: Oui. La charge de travail est importante. Les scènes et les épisodes ne sont pas forcément tournés dans l’ordre, il faut donc être extrêmement concentré et précis. Au début, je paniquais, mais la joie a très vite pris le dessus. Je sens que je rentre dans une chouette famille.
T7J: Connaissiez-vous déjà certains des comédiens et comédiennes?
EM: Oui, Ingrid Chauvin. Peu de gens s’en souviennent, mais elle est apparue dans mon premier clip, Le Sourire, en 2007. Le courant était passé entre nous.
T7J: Quel est donc votre personnage?
EM: Je joue François, un professeur de français qui arrive dans l’établissement où enseigne Chloé Delcourt (Ingrid Chauvin). Pour préparer le rôle, je me suis plongé dans des livres sur l’école. Je n’ai pas envie de « jouer au prof ». C’est un beau personnage, un enseignant qui cherche à s’adresser à l’individuel et au collectif, en usant parfois de l’humour.
T7J: Vous savez qu’avec Demain nous appartient, il peut tout arriver à votre personnage…
EM: Forcément, je vais avoir mon lot de surprises, mais je vous rassure, ce n’est pas pour tout de suite! (rires)
T7J: Vous êtes conscient que votre vie va changer, que la série amène à une autre sphère de notoriété?
EM: J’ai du mal à m’en rendre compte. Je me fie juste à ce que j’ai vécu par le passé. Je pense que je suis plus armé qu’à l’époque du Roi Soleil. J’étais trop jeune, je n’avais pas conscience de ma sensibilité. Je me sentais souvent agressé. Ce n’étais pas la faute des gens, bien sûr, je n’étais simplement pas prêt.
T7J: Votre carrière a été jalonnée de hauts et de bas. Qu’est-ce qui vous fait tenir?
EM: Je ne suis pas un aficionado de la lumière. Je sais que c’est improbable de dire cela quand on fait ce métier, mais c’est vrai. Les périodes de calme ne sont pas confortables à vivre, mais je sais que c’est dans ces moments-là que je fais des choses importantes. J’ai besoin d’introspection, de me nourrir, de me cultiver… Même si, bien sûr, j’angoisse à chaque fois! Mais les doutes me ravagent moins que par le passé.
T7J: Avez-vous l’impression d’avoir, parfois, joué la comédie dans votre vie?
EM: Oui, même si j’aurais préféré répondre le contraire. Avant, j’attendais beaucoup du regard des autres, de mes amis, de ma famille. Je voulais faire plaisir, être bien vu et, surtout, être aimé et intégré. Aujourd’hui, tout cela a moins d’impact sur mon quotidien.
T7J: C’est l’âge peut-être?
EM: Sûrement! J’ai un vrai plaisir à vieillir. J’ai traîné pas mal de choses, comme beaucoup de gens: une histoire, des évènements, des drames… Avec l’âge, et le fait de faire du ménage dans ma vie, je me suis débarrassé de beaucoup de choses. La mélancolie qui traînait sur mon épaule s’en est allée. Je ne pensais pas que ces années d’introspection m’avaient fait autant de bien. Je viens d’avoir 42 ans. Je savoure.